Les personnages frolliens (3/3)

Une certaine personne m’ayant fait les yeux du Chat Potté pour me demander de mettre à jour la liste des personnages frolliens, voilà que je m’y suis mise…en effet, quand on croit avoir épuisé la liste, on se rend compte que non, fort heureusement. La lignée de personnages inspirée, à dessein ou non, d’Ambrosio, Faust et autres Frollo (voir au passage et avec des violons plein les yeux la magnifique rétrospective des Frollo de Clelie) n’est pas près de se finir. Partons dans l’ordre chronologique de leur redécouverte, et non de l’ordre chronologique de leur création en lui-même…

Mesa & le Partage de Midi – Paul Claudel (1905-1949)

MESA : Pourquoi est-ce maintenant que je vous rencontre ?
Ah, je suis fait, je suis fait pour la joie ! […] Il est dur de garder son cœur. Il est dur de ne pas être aimé. Il est dur d’être seul. Il est dur d’attendre,
Et d’endurer, et d’attendre, et d’attendre toujours,
Et encore, et me voici à cette heure de midi où l’on voit tellement ce qui est près
Que l’on ne voit plus rien d’autre. […]
Je reste seul. Vous ne connaîtrez pas une telle chose que ma douleur.
Cela du moins est à moi. Cela du moins est à moi.

      Partage de Midi - Paul Claudel
Mesa du Partage de Midi. Je me demande encore comment il ne m’a pas été possible d’intégrer ce personnage à la liste de ceux dits frolliens, alors que je connaissais déjà son existence depuis longtemps. Quelle difficulté à rendre la personnalité de ce protagoniste, sans citer sans cesser son auteur ! Comment ne pas voir en ce prêtre raté, cet homme qui a voulu déposer sa vie aux pieds de Dieu, pour s’en trouver finalement rejeté, un autre personnage typiquement frollien ? Peut-être parce que Claudel, comme à son habitude avec ses personnages (dont la non moins énigmatique et insaisissable Ysé), ne nous rend pas ce protagoniste très facile à la première lecture. « Intact », Mesa a cela de particulier qu’il n’est qu’un reflet autobiographique de son auteur. Mesa fut Claudel, Claudel fut Mesa ; son éternel féminin, c’est Ysé ; et Ysé fut en réalité Rosalie Vetch. Cette Ysé qui intervient dans ce moment si personnel de doute du protagoniste principal, quand il commence à douter de sa foi et de quête personnelle. Claudel et Mesa, tous deux prêtres ratés, profondément spirituels, en quête d’absolu, d’un on ne sait quoi. Mesa n’a de mérite que sa résistance face à la femme (« et les femmes ne connaîtront jamais rien à vous » lui lancera Almaric), à Ysé, au premier acte, celle qu’il aurait aimé, et épousé, si tout avait été autre. Puis sa chute, au second acte, n’est que le début de sa décadence ; il trahit le mari d’Ysé en l’envoyant à la mort, pendant que son enfant grandit en cette femme qu’il aime de manière fusionnelle. Mesa est lâche, égoïste, hypocrite, résistant pourtant, digne au début, avant de sombrer définitivement dans sa passion qui devient sa seule raison de vivre, et le fait rejeter tout le reste.

Pourtant, il reste comme en lui une part de la culpabilité, de cette part qu’il réservait à ce Dieu dont il n’est plus digne. Ysé l’aime aussi, certes ; cela ne l’empêchera pas de le quitter pour Almaric (« et cet homme que j’aimais…Et je ne veux pas mourir, mais je suis jeune. Et la mort n’est pas belle, c’est la vie qui me paraît belle. ») Combien d’Esmeralda ou de Marguerite se sont retrouvées dans la même situation, face à cet homme qui les aime trop, tout en restant incompréhensible et froid, et distant et égoïste ? Mesa ne se rachètera pas en essayant de tuer Almaric ; comme tous les frolliens, il échoue assez lamentablement dans tout ce qu’il entreprend, en essayant d’atteindre cet absolu féminin qui ne veut plus de lui et qui le brûle, le transforme en rénégat et meurtrier. Jusqu’à la scène presque finale, ce paroxysme où on ne sait même pas si le personnage est mort ou non, où Mesa, au-delà de son égoïsme, parvient enfin à prononcer des mots qui ont tant manqué à Frollo, Ambrosio, John Jasper et tous leurs semblables antérieurs ou postérieurs. Et ainsi est la fin douce-amère de la pièce, quand Ysé lui revient, fantôme peut-être, mais absolu féminin réel, elle qui a été la déchéance du héros, et sera finalement son salut mystique, là où Dieu laisse l’homme seul et incertain.

« MESA : […] Ah ! je sais maintenant
Ce que c’est que l’amour ! Et je sais ce que vous avez enduré sur votre croix, dans ton Cœur,
Si vous avez aimé chacun de nous terriblement comme j’ai aimé cette femme, et le râle, et l’asphyxie, et l’étau!
Mais je l’aimais, ô mon Dieu, et elle m’a fait cela ! Je l’aimais, et je n’ai point peur de Vous,
Et au-dessus de l’amour
Il n’y a rien, et pas Vous-même ! »

 

José dans Carmen : ou le paradoxe du soldat déchu (1845 & 1875)

 Carmen - Roberto Alagan Il est assez délicat de classer Don José dans la catégorie des personnages frolliens. Il faut dire qu’il tient à la fois tellement de Frollo et de Javert ! Le côté bohème de son histoire, s’il rappelle Notre-Dame de Paris, ne peut pourtant faire oublier l’aspect javertien de ce personnage (voir l’interprétation qu’en donne Jonas Kaufmann en 2006). Autant dans la nouvelle que dans l’opéra, il est des mots, inévitablement, qui font penser à la fatale destinée de ses deux doubles : c’est autant « Je te tiens, fille damnée, et je te forcerai bien à suivre la destinée qui rive ton sort au mien ! Dût-il m’en coûter la vie, je ne partirai pas ! » que « Je ne veux plus t’écouter ! Quitter mon drapeau ? Déserter ? C’est la honte, c’est l’infamie ! Je n’en veux pas ! » Tout le personnage de José – et c’est encore plus flagrant dans la nouvelle, où la musique n’est pas là pour embellir l’écriture, et où Don José a une déchéance bien plus visible – repose entre ce dilemme de l’officier probre, qui finit par se perdre pour l’amour d’une bohémienne. Il n’est que le plus digne des hommes, destiné à une vie prospère et honnête. Tout en lui respire l’assurance et la volonté de ne pas fléchir, de l’impossibilité de la corruption.

Mais « s’il est des sorcières, c’est une certainement ! Cette fille-là a menti toute sa vie ; et pourtant je la croyais« , c’est Carmen qui le mènera à devenir un romi, un contrebandier, un meurtrier. Il n’a suffi que de la vue de cette femme fatale, représentant encore une fois tout ce que José n’a jamais vraiment connu (« Point de cloche qui sonne pour dire à l’amoureux qu’il est temps de partir ! Personne à qui obéir ! Tu verras comme c’est beau, la vie errante, pour pays l’univers, et pour loi ta volonté ! Et surtout la chose enivrante, la liberté ! »), pour que la jalousie, l’amour et la passion le tirent de sa vie terne et exemplaire, lui destiné à un amour d’enfance sous le voeu de sa mère. Carmen est l’envers de José, ce qu’il n’a jamais eu, mais ne peut la contrôler ; comme le prouvera la fin tragique des deux personnages. Il finit par commettre son crime passionnel, non sans avoir tenté jusqu’au bout de la récupérer, y compris contre sa volonté. Carmen, si l’on peut dire, n’est guère un absolu féminin, ou alors un bien étrange ; pourtant elle aura inspiré à José une évolution sublime et tragique, presque sur le chemin d’une rédemption où il souhaite entraîner son amante, en vain. Personne n’aura Carmen, si ce n’est lui ; et il passera encore la bague au doigt de cette femme après son meurtre, qu’il ne tardera pas à rejoindre dans la mort. Bien qu’il soit autant pantin que bourreau ici, il est l’image très particulière d’un frollien positif au début, qui finit par sombrer, comme tous les autres.

« Je ne menace pas, j’implore, je supplie ! Notre passé, Carmen, je l’oublie ! Nous allons tous deux commencer une autre vie, loin d’ici, sous d’autres cieux ! Eh bien, s’il le faut pour te plaire, je resterai bandit, tout ce que tu voudras, tout, tu m’entends, tout ? Mais ne me quitte pas ! Ô ma Carmen, laisse-moi te sauver, et me sauver avec toi ! […] Ainsi, le salut de mon âme, je l’aurais perdu pour toi ! Pour que tu t’en ailles, infâme, entre ses bras, rire de moi !…Pour la dernière fois, démon, veux-tu me suivre ? ….Vous pouvez m’arrêter, c’est moi qui l’ai tuée…ma Carmen adorée… » (Georges Bizet)

Mrs. Danvers : ou la seule femme frollienne (pour l’instant)
– In Rebecca de Daphné du Maurier

 Mrs Danvers - Rebecca

« No, she wasn’t in love with you. Or any man. She despised men, she was above all that. Love, with you, with any of you ? I was the only one she really loved. «  (Adaptation télévisée de 1997 de Jim O’Brien)

Nous pouvons, s’il vous plaît, applaudir le premier personnage frollien féminin, bien plus, beaucoup plus que la mère Gothel de Raiponce…Comme beaucoup des personnages du roman Rebecca, Danvers reste un mystère, mais son apparence et son visage, son attitude et ses mots, en disent assez pour la comprendre et voir à quel point cette femme sinistre n’a rien à envier à ses ancêtres littéraires. Danvers, à biend des égards, est la seule image concrète d’un frollien qui a perdu l’être qu’elle aimait. La fameuse Rebecca, dont l’ombre mystérieuse et malsaine plane tout au long du livre et des adaptations…

Toujours vêtue de noir, apparaissant quand on s’y attend le moins, méprisant ses rivaux et celle qui veut remplacer son « amour », Danvers n’est qu’un fantôme, un être livide, quelqu’un qui a perdu toute raison de vivre et d’exister. Si ce n’est pour parler de cette Rebecca qu’elle adorait, pour la conserver ainsi en vie et en mémoire, obsédée par elle et uniquement par elle. Le peu de passages où elle révèle son adoration pour cette femme sont simplements effrayants et démontre à quel point Danvers sera toujours marquée par elle. Elle ne dépassera jamais cette perte. L’éternel féminin élève ou tue, mais n’épargne jamais, comme une obsession jamais bénéfique, jamais positive. Il est difficile de savoir comment cette passion est née et a évolué ; on n’en mesure que les conséquences. Toujours tragiques, et toujours prouvant, malheureusement, que ce qui a éveillé Mrs. Danvers à sa raison de vivre, l’a tuée intérieurement, sans espoir de s’en relever, sans résultat autre que de continuer à perpétuer le souvenir de cette Rebecca – qui l’aura changée à jamais, de manière destructrice aussi bien pour elle que pour les autres.

« She’s invincible, she’s unbeatable
She is much too strong to die, she’s undefeatable
She’s invisible, but I know
She can see and hear me
She’s watching, she’s near me
She’s invincible.  »
(Rebecca, the musical)

Mrs Danvers - Rebecca
Impossible de ne pas rajouter quelques mots sur Mrs. Danvers, après avoir vu la version hongroise de la comédie musicale Rebecca  Si quelques aspects de l’adaptation sont parfois contestables, on ne peut nier que Mrs. Danvers forme aux côtés de Maxim de Winter et la narratrice, une ombre et une menace palpables et impressionantes. L’interprète, Veronika Nádasi, n’est certes pas la créatrice du rôle hongrois. Pourtant, quel charisme et quelle ténèbres se dégagent d’elle ! Sa présence se fait maléfique et pesante tout du long, puisque c’est elle qui introduit de manière claire, avec les paroles, le thème musical de la chanson « Rebecca », qu’elle se plaira à ré-utiliser avec plusieurs variantes tout au long des deux actes musicaux. Sans elle, le souvenir de Rebecca ne sera pas autant palpable…dans la déchéance de son deuil qui ne terminera jamais, elle devient pour la narratrice un personnage oppressant, d’autant plus frollien qu’elle se plaît à rappeler l’intensité de son amour pour Rebecca, qui restera à jamais « Mrs. de Winter » pour elle. Que ce soit par son adoration pour les orchidées des Rebecca, la répétition constante de la femme qu’elle était dans ses mots ou le feu qu’elle mettra à Manderley, on sent à quel point Mrs. Danvers a adoré cette femme plus que tout le reste et à quel point elle demeure prisonnière d’elle et de cette adoration malsaine. Quand la narratrice jettera les orchidées à terre, changeant tout dans la chambre de Rebecca, Danvers s’écroulera à terre, presque vaincue. Mais pendant tout le reste du musical, elle reste sombre, fanatique, pesante, malsaine. Capable de ramener les fantômes du passé, d’autant mieux qu’elle restera à jamais du côté de Rebecca. Elle n’a plus rien à perdre, ce qui la rend encore plus terrible. Cela lui importe alors peu de pousser l’héroïne à se tuer, ou de mettre le feu à Manderley (car la cheminée ne doit plus lui suffire) : tout est bon pour rappeler le souvenir de celle qu’elle a aimée et le faire respecter par tous, pour effacer la nouvelle Mrs. de Winter.


John Jasper : The Mystery of Charles Dickens (1869 & 2012)

 John Jasper, du Mystère d’Edwin Drood, avait déjà été évoqué dans la liste des personnages frolliens, sans réellement laisser beaucoup d’impression, principalement parce qu’il est laissé en arrière-plan et que Dickens n’a jamais pu terminer ce roman. Pourtant, l’adaptation de la BBC l’a remis au goût du jour, en inventant cette fin…et avec une certaine surprise (et logique), elle a placé le personnage de John Jasper au coeur de l’intrigue. Raremement on aura ainsi rendu hommage à un type de personnage, en lui donnant une aussi importante place dans une adaptation. Campé sous les traits de Matthew Rhys, charismatique en tout point, le personnage, musicien d’Eglise, opiomane, « père adoptif » de son neveu, ne prend que de la subtilité et de la complexité. Il passe des moments de noirceur sombre (noyée dans ses rêves délirants d’opium, où il tue son propre neveu) et d’ambition cachée (« Ne croyez-vous pas que je serai ailleurs qu’à donner la direction à un choeur d’enfants dans cette église, si je le pouvais ? ») à des déclarations aussi passionées que menaçantes à Rosa, la fiancée de son neveu Edwin, quand celui-ci disparaît sans explication. Sans oublier un certain esprit machiavélique, tout comme un profond chagrin et accès de désespoir qui le saisiront quand son neveu est déclaré mort.

 John Jasper - Le mystère d'Edwin Drood

« You’ll love me, Rosa, I’d rather die too.If you could see yourself, Rosa, in your panting hatred, you’re more desirable than ever. In the end, you will love me. Nor does it matter if you love me or hate me. I no longer care. Ugly and cruel, yes, you have made me so and you will still come to me. Rosa, I love you more than any man ever loved a woman and you will never be rid of me. I will pursue you to the death. »

 Mais le côté frollien et aisément prévisible du personnage ne s’arrête pas là. (Ne lisez pas ce dernier paragraphe, si vous voulez éviter les spoilers…) Dans la seconde partie de l’adaptation, John Jasper prend une toute autre figure, et devient là encore, comme Mesa, presque le seul frollien qui atteindra le salut, si l’on peut dire…Persuadé d’avoir tué son neveu, il découvrira qu’au final, c’est son propre père qu’il a tué, et qu’Edwin est son frère. Malheureusement, le personnage sombrait d’ores et déjà dans le délire, la culpabilité du meurtre (il adorait Edwin, après tout…) et un délire tout mystique. Les sourires carnassiers et inquiétants qu’il offrait à Rosa disparaissent, il cesse de chanter à tue-tête dans sa cathédrale (un côté Phantomien, probablement), et se croit hanté par le fantôme de son fraticide. Effondré, désespéré, conscient que Rosa ne l’aimera jamais, il choisit alors de faire justice lui-même et de se suicider, en vaine tentative de rétablir les choses. Tout cela, hélas, sous les yeux de son frère et de son meilleur ami. A l’instar de Javert, si l’on peut dire, John Jasper a choisi de mourir « dignement » ou du moins honnêtement à ses yeux, plutôt que de s’enfoncer encore plus. Le portrait que fait l’acteur de ce personnage inachevé n’en devient que plus superbe, et empli de noirceur se tournant vers la lumière, à la toute fin.

« Je vous aimais à la folie ; pendant le travail détesté de la journée, dans la détresse des nuits d’insomnie, étreint par la sordide réalité ou bien errant dans des paradis et des enfers peuplés de visions où je me précipitais en serrant votre image dans mes bras, je vous aimais à la folie. » (Charles Dickens)

Merci à Clelie pour la citation et cette redécouverte du personnage ^^

1887 & 1900 : « O Scarpia, nous nous reverrons devant Dieu ! »

 Scarpia - Ruggero Raimondi

Une découverte également inattendue est celle de Scarpia de l’opéra/pièce Tosca de Puccini et Victorien Sardou. En allant voir la représentation, ne connaissant que les grandes lignes de l’histoire, Scarpia ne m’apparaissait pas vraiment frollien. C’est en découvrant ses mots derrière le chant d’opéra, que cet aspect est enfin apparu…Campé, selon les chanteurs, comme un monstre bestial ou un homme en apparence charmant et poli, qui cache tout un côté sadique et obsédé. Tout cela révélé en dix minutes d’opéra, probablement parmi les plus intenses qui existent dans ce domaine musical.

En ce stade, c’est plus l’interprétation de Ruggero Raimondi (voir l’image, la vidéo…on lui décerne d’ailleurs l’award du baiser frollien le plus ignoble et insupportable) qui lui rend le plus de justice et de complexité. Décrit par son créateur, Victorien Sardou, comme un fanatique hypocrite, un mauvais croyant, un homme politique injuste, cela s’amplifie quand il prend conscience de l’attrait exercé par Tosca, une cantatrice plutôt puérile, qui devient fière et forte lorsque cet homme torture son amant pour des causes politiques. Tout en ce personnage respire l’hypocrisie, le jeu des faux-semblants ; entre le libertin qui se plaît à chanter sa future possession de Tosca au milieu d’un Te Deum à l’église, son rire qui suit l’exclamation « Tosca n’a jamais été aussi tragique sur scène, que lorsqu’elle voit son amant torturé ! » ou l’homme qui dit que la torture d’un homme a interrompu son « pauvre souper », je ne sais quel moment donne le plus envie de le haïr… Indéniablement, le personnage possède un charisme certain et des répliques mémorables, mais sans nul doute très peu de subtilité et aucun éventuel pardon. Cet homme-là reste irrécupérable, ce que comprendra Tosca, lorsqu’elle finit par le poignarder jusqu’à la mort. « Il est mort…maintenant je lui pardonne ! »  Personnage davantage dans la lignée d’Ambrosio, il est inutile de parler ici d’éternel féminin ou d’absolu. Le personnage est trop noir pour cela.

Toutefois, il est certain que l’emprise de Scarpia ne s’arrête pas là. S’il est présent pendant tout l’acte II, la fin de l’Acte I, et mort avant le début du IIIe acte, sa présence se ressentira encore, puisque son influence entraîne la fusillade pour l’amant de Tosca, et le suicide pour celle-ci. Ses derniers mots seront : « Je payerai le meurtre de Scarpia avec ma vie…Ô Scarpia, devant Dieu ! » Avant que ne s’enclenchent les dernières notes de l’opéra, qui ne sont autres que le thème personnel et menaçant de Scarpia…

« Démon, soit !… Comme tel, ce qui me charme, créature hautaine, c’est que tu sois à moi… avec rage et douleur ! que je sente bien ton âme indignée se débattre… ton corps révolté frémir de son abandon forcé à mes détestables caresses, et de toute ta chair, esclave de la mienne ! Quelle revanche de ton mépris, quelle vengeance de tes insultes, quel raffinement de volupté, que mon plaisir soit aussi ton supplice… Ah ! tu me hais !… Moi, je te veux, et je me promets une diabolique joie de l’accouplement de mon désir et de ta haine ! » (Victorien Sardou)


Stannis Baratheon, le roi de fer.

Ne lisez pas cette description de Stannis, si vous souhaitez ne pas vous spoiler sur l’intrigue de Games of Throne. ^^ Ce superbe article a été fait par F. de l’O., qui connaît bien mieux ce personnage que moi pour avoir lu les livres et découvert la série depuis déjà un moment. Un grand merci à elle pour cet ajout aux personnages frolliens !!

C’est une silhouette mince, sombre et élevée, qui en personnage frollien digne de ce nom, aborde un visage fermé, impassible, la plupart du temps, si ce n’est ses yeux, clairs et vibrants. Si Stannis est seulement évoqué dans le premier tome (ou la première saison) du trône de fer, et que sa présence est discrète, il s’impose rapidement comme l’un des personnages centraux de l’intrigue.

 Stannis Baratheon
Stannis est connu pour son sens aigu de la justice, au point où le mot « équité » lui est plus souvent assimilé que le terme « clémence ». Certains attribuent sa rigidité morale à la disparition tragique de ses parents, durant son enfance. Stannis n’a aucun tact, c’est le moins que l’on puisse dire, il énonce ce qu’il pense des uns et des autres sans s’inquiéter un seul instant des conséquences éventuelles. Ses mœurs sont fréquemment qualifiées d’austères ; sa mâchoire est la plupart du temps lourdement bloquée, tandis que l’accomplissement conjugal, autant dire les plaisirs de la chair, ne semblent jamais l’avoir ému plus que cela. Élevé au milieu d’une fratrie de trois garçons, Stannis prétend qu’il n’a jamais aimé son aîné, Robert, roi assassiné par les Lannister, alors qu’il n’a éprouvé -en vérité- qu’admiration à son sujet. Il faut dire qu’il ne ressent que rancœur et jalousie à l’égard d’autrui, estimant n’avoir été que trop longtemps injustement traité, mis à l’écart, ou pas suffisamment respecté.

« Stannis est le fer, noir et dur et solide, oui, mais cassant, tout comme le fer. Il se brisera plutôt que de plier, » écrit Martin.

Autant dire qu’il semble être le type même du personnage frollien, non sans quelques tendances « javertiennes ».

Pour en revenir à ses débuts, Stannis a assisté à la mort de ses parents et a éprouvé cela comme une lourde injustice, au point de rejeter les Dieux de ses ancêtres, dont il n’hésitera pas à brûler les idoles, (dans l’intégrale 2 ou l’épisode un de la saison deux, de Game of Thrones). Stannis grandit dans l’ombre de son frère aîné, jusqu’à ce que ce dernier se rebelle contre le Roi Fou, et prenne sa place. Un certain Davos Mervault, contrebandier d’état, ne tarda pas à rendre service à Stannis, au sein d’un siège, durant la guerre. Baratheon l’accepta à ses côtés en échange de son aide, mais lui trancha néanmoins quatre doigts, en souvenir de ses années de contrebande ; voilà un sens de l’équité pour le moins aiguisé, sans mauvais jeu de mots. Davos, un peu comme un certain Valjean, éprouve quelques regrets vis-à-vis de l’homme qu’il a été, mais qu’admiration, envers l’homme qui lui a permis de retrouver le droit chemin. Davos est un homme indubitablement moral, qui sert à la fois de tact à Stannis, ainsi que de « conscience », selon Martin. Stannis a ensuite siégé au conseil du Roi, où il a notamment pris la décision d’interdire la prostitution au sain de la ville royale. Il a par ailleurs épousé une femme qu’il trouve laide, repoussante, et qui ne lui a jamais donné aucun enfant (mâle), si ce n’est une fille de santé fragile, et défigurée de surcroît. Stannis ne leur rend visite qu’une ou deux fois par an.

Baratheon est quoiqu’il en soit l’un des protagonistes principaux du « jeu du trône » puisqu’il est l’un des cinq rois à se disputer la couronne, après la mort de Robert. Stannis est la plupart du temps suivi d’une étrange femme à la chevelure aussi écarlate que son aura. Melisandre, la prêtresse rouge, semble en outre dotée de capacités surnaturelles. On peut aisément la qualifier de fatale enchanteresse puisque Martin la nomme lui-même « l’âme damnée » de Stannis. Melisandre a une étrange influence sur Baratheon, et semble prête à tout pour le mener sur le trône. Elle prétend qu’il est le messie d’un certain Dieu de Lumière; ainsi, il semblerait que l’homme de fer s’enflamme et se consume pour les yeux d’une étrangère. Melisandre devrait le mener sur le chemin de la grandeur, ou peut-être l’auto-destruction.

 Stannis Baratheon - Game of Thrones
Le moment où Stannis rencontre son frère cadet Renly pour que celui-ci se soumette et joigne ses rangs, est un passage culminant de l’intrigue. En effet, après avoir essuyé refus et moqueries, (et bien que Stannis paraisse à la fois ambigu et empli de remords par la suite), il semblerait qu’une ombre se soit immiscée dans la tente de Renly, la nuit succédant leur rencontre, et l’ait poignardé à mort. Cette scène ne rappelle-t-elle vraiment rien aux amateurs de Frollo ? Stannis va ensuite déclarer la guerre, en compagnie de ses hommes, à celui qui usurpe le trône de fer, pour connaître une amère défaite. Il semblerait en effet que le fantôme de Renly soit venu se venger durant la bataille, désarçonnant les troupes de Baratheon. Mais il ne s’agit encore une fois que d’un mirage, puisqu’il s’agissait en vérité de l’arrivée de Tywin Lannister alias Charles Dance. A ce stade de l’intrigue (fin de l’intégrale deux), Stannis a pratiquement tout perdu et se réfugie, s’isole dans une tour, déchiré par la mélancolie et la fatigue morale, comme physique…

Il ne renoncera pourtant jamais à son objectif, non pas parce qu’il est arriviste, mais parce qu’il considère le trône de fer comme lui revenant de droit, et qu’il est donc de son devoir d’assurer autorité et protection au royaume, car telle est sa destinée.

« They will not love me, you say ? When have they ever loved me ? How can I lose something I have never owned? » 


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