La splendeur du pingouin (Penguin : Pain and Prejudice) – Kudranski Szymon & Hurwitz Gregg, 2012
Le topo : Comment le Pingouin est-il devenu l’un des criminels les plus redoutés de Gotham ? Quel a été son passé pour le mener à devenir un être aussi cruel et impitoyable, et pourtant capable de plus d’humanité que certains antagonistes de Batman ? Ce comics présente une version de l’histoire du Pingouin, un des personnages les ambigus de l’univers de Batman.
Le résultat : Tout simplement un comics superbe sur le protagoniste du Pingouin, qui lui donne une autre histoire que celle de la série Gotham ou le film Batman le défi de Tim Burton. L’exercice aurait vite pu sombrer dans les clichés, mais c’est une genèse intelligente et sombre du Pingouin qui est proposée là, servie par des dessins tout en ombres et en lumières, qui jouent avec les contrastes et une atmosphère volontairement tournée vers le tragique. On découvre ainsi le Pingouin benjamin d’une famille qui n’aura de cesse de le mépriser, en-dehors de sa mère, rejeté par ses proches et par ses camarades d’école. Évidemment, c’est cette haine venant du monde extérieur qui le mène à devenir aussi impitoyable, calculateur et terrible, comme le prouvent les moments où il détruit littéralement la vie de chaque personne le sous-estimant ou le raillant. Outre cette ascension et cette puissance, on voit aussi sa romance avec une jeune femme aveugle, persuadée qu’il est un homme de bien. L’histoire ne peut que mal finir, mais ce comics vaut le détour pour ceux qui aiment l’univers de Batman ou le personnage d’Oswald Cobblepot.
Phonogram : Ex Britannia (tome 1, en version couleurs) – Kieron Gillen, Jamie McKelvie, Matt Wilson, 2006 (Abandonné)
Le topo : Dans un monde où la musique est magique, le phonomancien David Kohl enquête sur la mort de la déesse de la pop, Britannia.
Le résultat : De Phonogram, je ne pourrais pas dire grand-chose, étant donné que j’ai abandonné la lecture au premier quart. Si l’ouverture s’avérait assez intéressante, pour quiconque ne connaît pas bien les courants de musique pop ou même généraux, certaines références à la pop-culture, la lecture perd vite de l’intérêt en même temps que de la compréhension. Difficile de continuer dans une lecture où on n’a pas toutes les références pour comprendre ce dont les personnages parlent, ou peut-être même le contexte très londonien de l’histoire. L’intérêt de l’histoire n’a pas suffi pour outrepasser cette lacune.
Barracuda : Esclaves (tome 1) – Jean Dufaux & Jérémy, 2010
Le topo : Durant l’époque de la piraterie, la cour de Dona Emilia del Scuebo se fait attaquer par l’équipage du capitaine Barracuda. Les prisonniers faits se retrouvent vendus comme esclaves sur une île qui sert de repaire aux pirates. Parmi eux, la fille d’Emilia del Scuebo, et leur valet, qui se retrouve déguisé en fille pour s’assurer une chance de survie. Le destin des pirates et des esclaves se croise, cherchant le trésor des Scuebo pour les premiers, et à survivre, pour les autres.
Le résultat : Il m’est plus difficile de chroniquer les BD, mais j’ai apprécié celle-ci, tant par son histoire que ses dessins, qui représentent avec soin l’univers des pirates dans ses détails, et en même temps avec un trait rugueux, sombre, qui convient parfaitement à cette atmosphère. Il faut sans doute plus qu’un tome pour complètement accrocher à cette série, mais le parti pris de débuter une série sur les pirates depuis la terre ferme, est intéressant. Quant aux deux jeunes héros, on est curieux de les voir évoluer dans un univers dangereux, loin de leur monde habituel, et de savoir comment ils vont s’en sortir par la suite…
Pirates de tous les pays : l’âge d’or de la piraterie atlantique (1716-1726) (Villains of All Nations: Atlantic Pirates in the Golden Age) – Marcus Rediker, 2004
Le topo : Retracer l’histoire de l’âge d’or de la piraterie (1716-1726) du point de vue économique, social et historique, et surtout la vie des pirates de l’époque au quotidien, les raisons de devenir pirate, leurs conditions de vie et de mort, leur organisation sur un navire, le tout en exposant la vie des plus célèbres d’entre eux.
Le résultat : Un livre passionnant à lire, bien qu’il se révèle un peu touffu au début en replaçant le contexte de l’époque du XVIIIe siècle. Sans jamais être élitiste, l’auteur parvient à raconter son sujet de façon passionnante et à présenter la vie des pirates en s’accompagnant des sources de l’époque. Ainsi, il évoque des chapitres très divers mais très complets : ce que représentait la piraterie pour l’époque (un ordre social indépendant et libre, plus juste et plus égalitaire, quoique empreint de violence et où on ne vivait jamais très longtemps), comment certains marins ou esclaves devenaient pirates, les tentatives d’oppression et de condamnation faites par les autorités envers eux, la façon de vivre des pirates, leurs règles, leur philosophie de vie qui tenait parfois presque de l’engagement contre la société, ou encore la façon dont ils déstabilisaient et renforçaient en même temps l’activité économique des mers… On croise aussi la description de la vie de célèbres pirates, tels Barbe-Noire, Anne Bonny, Mary Read ou Walter Kennedy. Bref, si l’on veut découvrir la vie des pirates tout en gardant le contexte de l’époque à l’esprit, et en s’éloignant des clichés engendrés par l’imaginaire collectif, c’est un excellent ouvrage.
Swastika Night (écrit sous le pseudo de Murray Constantine) – Katharine Burdekin, 1937
Le topo : L’auteur livre une dystopie sur un monde gouverné par le Saint Empire Germanique, des siècles après la victoire d’Hitler. Dans cette société, les nazis et les chevaliers sont à la tête du gouvernement, les étrangers servent de main d’œuvre, les femmes ne sont là que pour la reproduction. La société sur une mythologie divine établie autour d’Hitler et sur l’ignorance de ce qui existait avant lui, les Allemands étant un peuple sans passé au-delà de cela. Quand un Anglais en pèlerinage croise la route du chevalier Von Hess, il séduit suffisamment le chevalier pour que celui-ci se décide à lui confier un secret qui le remet en cause sur le monde tel qu’il est…
Le résultat : Ce bouquin a été difficile à lire, en partie par son sujet, qui expliquait pourquoi j’avais du mal à rentrer dans le rythme de la lecture. Ensuite, j’ai – toujours maintenant – du mal à réaliser que ce livre a été écrit avant l’avènement du nazisme et avant la Seconde Guerre Mondiale, alors qu’il retrace avec une extrême clarté ce qui est arrivé les années suivantes. Peut-être est-ce son aspect dystopique, d’une anticipation assez terrifiante pour l’époque, qui met à ce point le lecteur à distance. Pourtant, quand on voit le caractère prophétique du roman, c’est assez effrayant. J’ai toujours été fascinée par les dystopies « à l’ancienne » (non pas celles sorties ces dernières années, mais 1984, Le Meilleur des Mondes, etc.) et en apprenant l’existence de celle-ci, j’ai également voulu l’ajouter à mes lectures. Dans cette dystopie/uchronie, le Saint Empire Germanique domine la moitié du monde dans une sorte de système féodal, extrêmement codifié, articulé autour d’une mythologie hitlérienne, où le passé avant sa victoire n’existe tout simplement pas : personne n’en a souvenir. Les femmes y sont réduites à des êtres plus animaux qu’humains, sans véritable conscience, au potentiel génétique et intellectuel dégénéré par des siècles de mauvais traitements : elles sont là uniquement pour servir de mères reproductrices. Même les musiques et l’art sont germanisés, les familles n’existent pas, la virilité est privilégiée à tout prix. Comme on s’en doute, le but du roman est ensuite de faire découvrir aux protagonistes la véritable histoire derrière ce monde autoritaire, ce qui ne se fait pas sans remise en questions pour les personnages. Cela permettra à l’auteur d’expliquer comment ce monde a pu finir par exister, par de nombreuses discussions philosophiques et théologiques, et par la même occasion, d’avertir – pour l’époque – du danger des régimes autoritaires et dictatoriaux.
Des lectures très intéressantes ! J’avoue que La splendeur du Pingouin me tente particulièrement, de même que Swastika Night… Pour le premier, j’avoue que le personnage d’Oswald Cobblepot de l’univers de Batman m’a toujours glacée (toujours pas remise d’ailleurs de l’interprétation de De Vitto dans le rôle pour le film de Burton en 92 :))… Ce comics me tente donc assez ! Concernant le second livre, il doit être très troublant, en effet, de savoir qu’il a été écrit avant la seconde guerre mondiale… Je ne connaissais pas du tout, mais tu me donnes très envie de m’y plonger ! Dans le même registre, j’ai toujours Le Maître du Haut-Château de Philip K.Dick dans ma PAL, même si le contexte est légèrement différent…
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La splendeur du Pingouin est vraiment très intéressant, montrant un côté aussi tragique qu’humain. Ça devrait te plaire sans difficulté. C’est vrai qu’il reste un personnage très à part, pour lequel on peut avoir de l’empathie, mais qui est assez terrifiant. Son interprétation dans le film de Burton est géniale ! Pour Swastika Night, il est en effet très troublant, par son anticipation et la société qu’il met en place, qui est vraiment glauque et délétère à certains égards. Il était inédit en France jusqu’à fin 2016, ce qui explique qu’on ne l’ait pas connu avant. Je dos également lire le Maître du Haut-Château, il attend depuis longtemps 🙂
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