Voilà quelques mois que je ne suis pas revenue sur mes dernières lectures. Pour tout dire, je suis dans une période compliquée où je peine à avoir envie de lire, où je repousse la lecture de certains ouvrages attendus par peur de ne pas être assez concentrée et impliquée dans ma lecture, et où parfois j’abandonne après quelques dizaines de pages par manque d’envie. Tant bien que mal, quelques mots malgré tout sur les derniers romans qui me sont passés entre les mains ces trois derniers mois.
Simulacres martiens – Eric Brown
Il aurait été difficile de passer à côté de cette novella mêlant Sherlock Holmes et science-fiction. Simulacres martiens est ainsi une uchronie où les Martiens auraient envahi la Terre au XIXe siècle, apportant leurs connaissances scientifiques aux humains, mélangeant leur civilisation à la leur. Sherlock, passionné par la culture martienne, est alors appelé à enquêter sur un meurtre ayant lieu sur Mars.
Plus une aventure qu’une véritable enquête holmésienne, Simulacres martiens demeure rafraîchissant et original par son contexte futuriste mêlé au classique victorien. C’est l’occasion de découvrir que la cohabitation entre humains et martiens ne se fait pas sans heurts, tout en entraînant des bienfaits…en théorie en tout cas. Il faut le dire, c’est quand même assez drôle et fascinant de voir les personnages holmésiens dans un tout nouveau contexte, dans un univers qui est très bien travaillé, se révélant au fur et à mesure des pages pour dévoiler les changements induits par les martiens. Néanmoins, il faut reconnaître que Holmes et Watson demeurent assez souvent spectateurs, plus qu’acteurs dans cette histoire bien menée. Cela n’en fera pas un des Heure-Lumière les plus mémorables pour moi, même s’il a une véritable identité et originalité propres !
Blackwater, tomes 1 et 2 – Michael McDowell
Perdido, petite ville forestière au sud de l’Alabama, se voit submergée par une crue. Face aux dégâts, le clan familial de Mary-Love et de son fils Oscar cherche à se relever et à remettre leur scierie en route. Mais la mystérieuse apparition de Elinor Dammert suite à la crue va donner à rebattre les cartes dans ces jeux de pouvoir familiaux, et secouer la ville toute entière…
Roman-feuilleton de Michael McDowell (l’auteur derrière Beetlejuice), Blackwater se présente dans une magnifique édition pour la première traduction française de cette œuvre. L’éditeur Monsieur Toussaint L’Ouverture ne fait jamais les choses à moitié ! Le premier tome met en place la ville de Perdido, les clans des familles, l’arrivée d’Elinor. Au second tome, on passe déjà aux choses sérieuses, ce qui rend l’histoire bien plus addictive qu’il n’y paraît. Les intrigues familiales se mêlent, on se marie pour gagner du pouvoir ou de l’indépendance, tandis que les deux femmes principales, Mary-Love et Elinor, se dressent clairement en rivales pour décider du futur de Perdido. Ajoutez-y une touche de fantastique un peu sanglant, et les romans deviennent vraiment fascinants, faisant vivre le lecteur/la lectrice dans cette petite ville emplie de drames humains, et lui faisant porter plus d’intérêt qu’il n’y pensait au premier abord. Une lecture inattendue et prenante dont je ne manquerai pas de découvrir les tomes suivants.

Death Stranding, créer le lien par le jeu – Anthony Fournier
Suite au fait d’avoir terminé le jeu Death Stranding – et dont je parlerai sur ce blog, promis – j’ai enchaîné avec la lecture de cette analyse d’Anthony Fournier. Le documentaire est riche en détails sur les circonstances de la création du jeu, sur le portrait de son créateur, autant que l’analyse et le décorticage du monde, de l’univers et des personnages. Voilà une lecture enrichissante et passionnante, qui ne peut que ravir ceux et celles qui ont aimé le jeu.
Mamie Luger – Benoît Philippon
Roman policier où l’humour et l’ironie règnent en maître, Mamie Luger est une vieille dame de cent deux ans, arrêtée par la police pour avoir canardé son voisin avec un Luger. L’inspecteur Ventura, chargé de l’interroger, va alors entendre le récit de toute la vie de la centenaire, une vie aussi bien remplie de souvenirs… que de cadavres. De la seconde guerre mondiale aux années suivantes, Mamie Luger a eu en effet trente-six vies en une, plusieurs maris ayant tous finis morts dans d’étranges circonstances, et ce n’est qu’une partie des cadavres enterrés dans sa cave. On n’est pas toujours là pour la crédibilité, mais on la suspend juste ce qu’il faut pour se laisser embarquer dans un récit assez drôle et cru, noir, à l’humour pince sans rire parfois, avec une protagoniste qui finit par devenir attachante avec les multiples surprises qu’elle réserve.
Nous allons mourir ce soir – Gillian Flynn
Chaque été, je lis un Gillian Flynn. Il est triste de me dire que je n’ai plus que Les lieux sombres à découvrir d’elle (et les adaptations cinématographiques / sérielles issues de ses romans). Nous allons mourir ce soir, extrêmement court (une soixantaine de pages) n’est sans doute pas aussi mémorable que Les Apparences ou Sur ma peau, du fait de son format court qui laisse moins de temps à passer avec les personnages. Néanmoins, en 60 pages, l’autrice offre une intrigue aussi ciselée qu’à son habitude, jouant sur des personnages gris dont les intentions sont toujours troubles, et une atmosphère toujours aussi prenante et étouffante. Une narratrice anonyme, travailleuse du sexe, se met en tête d’arnaquer les gens en se faisant passer pour une voyante. Mais la demeure gothique où on l’engage dégage un mal bien réel, concentré autour de Miles, le jeune beau-fils la propriétaire.
Une histoire trouble, qui joue encore une fois avec ce que l’on décrypte de l’histoire, où on ne sait exactement où vont la culpabilité et l’innocence des personnages, jusqu’à une fin assez marquante. L’autrice sait décidément comment rendre ses personnages insaisissables et inquiétants à la fois.
Jours de sable – Aimée de Jongh
En 1937, John Clark, photojournaliste, est envoyé au Dust Bowl, région entre le Texas et le Kansas. Son agence le charge de prendre des photos afin de témoigner des conditions de vie de cette région frappée de tempêtes de sable, y rendant la vie invivable durant la Grande dépression.
Une bande dessinée qui donne le sentiment de respirer le sable qui la parcourt, qui donne l’impression d’y suffoquer comme les habitants du Dust Bowl. Jours de sable parle évidemment de la mission d’un photo reporter – un changement de cadre permet de donner une vision déformée de la réalité et influencer l’opinion publique – mais surtout de la vie quotidienne de ces gens prisonniers de la sécheresse et du sable, obligés d’abandonner leur ferme et leur maison pour vivre ailleurs, dans un milieu moins hostile qui ne les tuera pas. On sent les recherches historiques derrière la bande dessinée, tout comme on voit, entre chaque chapitre, les photos réelles de l’époque. Une histoire assez émouvante, à l’atmosphère aride marquante, pour quiconque aime les bandes dessinées historiques ou qui appréciera simplement de découvrir un épisode d’Histoire des Etats-Unis des années 30.

L’île du diable – Nicolas Beuglet
Autre roman policier, L’île du diable est cette fois un thriller. Si je n’ai pas lu les tomes 1 et 2 de cette trilogie, cela n’empêche pas de suivre l’intrigue avec ce côté page-turner qui sied tant au genre. Au pire, j’ai simplement un peu manqué l’histoire d’amour en toile de fond.
Sarah Geringën est une ex-inspectrice norvégienne, commençant tout juste à se remettre de ses aventures précédentes. Mais lorsqu’elle apprend la mort de son père, elle se rend sur les lieux du crime : il a été assassiné, recouvert d’une étrange couche de farine. Son enquête commence alors pour trouver le meurtrier, l’amenant jusqu’en Russie… C’est un thriller efficace, parfois un peu longuet dans ses 200 premières pages, avant un revirement terrible. S’il est vrai que je ne me suis guère attachée à l’héroïne, l’intrigue criminelle elle-même ne manque pas de rebondissement, utilisant tour à tour les thématiques de la dissociation de personnalité, la psychogénéalogie, ou encore certains faits sombres et réels de l’Histoire de la Russie… il vaut mieux avoir le cœur bien accroché par moments ! L’auteur a magnifiquement exploité un fait historique pour donner corps à son histoire de manière glaçante. Cela donne envie de donner sa chance à d’autres romans policiers..
Émergence 7 – Vincent Mondiot & Enora Saby
Léon s’apprête à déménager de la petite île bretonne où il vit depuis des années. Il n’a pas encore annoncé la nouvelle à ses amis. Mais alors qu’il attend le bateau qui l’emmènera à l’école avec ses amis, un monstre gigantesque émerge de l’océan et dévaste l’île… Vingt ans plus tard, c’est le récit de cette journée que Léon adulte fait, entre les souvenirs, les regrets et les traumatismes.
Un livre-objet déjà remarquable par les illustrations qui se trouvent à chaque page, le texte s’insérant ensuite pour articuler le récit. Les personnages nous sont montrés, les décors aussi, en adéquation avec le rythme de l’histoire. L’immersion se fait alors totale dans ce récit d’une journée terrifiante guidée par la mort et le chaos. On alterne entre les couleurs des souvenirs avec les chambres des enfants avant la catastrophe, notamment, pour ensuite replonger dans des pages plus sombres, aux couleurs plus ternes, pour ramener à la réalité du moment. Les mots du récit sont soigneusement choisis pour évoquer les sentiments et l’action, sans superflu, toujours avec une justesse touchante. Une très belle collaboration entre deux artistes, qui donne un roman graphique très émouvant, beau et sombre à la fois, qui parle de (non)-résilience, des souvenirs d’enfants et de leur fin, du passage entre l’adolescence insouciante à un âge adulte trop vite arrivé, de l’écologie et de la nature aussi, mine de rien. On vit ce récit par les mots lus, mais aussi par les illustrations, toujours frappantes, qu’elles soient comme des scènes figées silencieuses, ou au contraire remplies d’action et de décombres.
Je n’ai pas adhéré à Black Water mais Simulacres martiens me tente beaucoup 🙂
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C’était une lecture assez sympathique ! Et puis comment résister à Sherlock ? Qu’est-ce qui t’a déplu avec Blackwater ?
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J’ai trouvé ça creux et les personnages stéréotypés à l’extrême…
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Sans surprise, je n’ai lu aucun de ces livres, à l’exception de Death Stranding. Ce n’est pas l’analyse de Third Edition la plus fouillée que j’ai lue, mais comme d’habitude, leurs ouvrages sont gage de qualité et irréprochables au point de vue documentaire.
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